Mieux comprendre le suicide :
MYTHES ET PRÉJUGÉS
Chut!… Entendre parler de suicide est souvent déstabilisant. Quand une personne de ton entourage parle de suicide, tu peux te demander si elle a véritablement l’intention de passer à l’acte et comment tu dois agir. Rassure-toi; bien des gens sont déroutés lorsqu’ils entendent parler de suicide. Le suicide est encore tabou.
Des croyances bidon. Lorsque quelque chose est tabou, on en entend peu parler et on en a parfois une compréhension erronée. Il existe plusieurs mythes et préjugés à propos du suicide. Ils sont la conséquence d’une incompréhension, d’un inconfort et d’une impuissance par rapport à cette problématique. Ces préjugés peuvent empêcher une personne qui en a besoin de recevoir de l’aide.
Le désir de mourir. On a souvent tendance à croire qu’une personne suicidaire veut mourir. Une personne qui adopte un comportement suicidaire veut plutôt cesser de souffrir et non arrêter de vivre. Elle a épuisé les moyens qu’elle connaissait pour mettre fin à sa souffrance. Son problème l’aveugle et l’empêche de voir les autres solutions qui s’offrent à elle et celles-ci existent. Les adolescents peuvent épuiser très rapidement les moyens qu’ils connaissent pour tenter de diminuer leur souffrance d’où l’importance de rester à l’écoute lorsqu’un adolescent vit des difficultés.
La manipulation. On peut être porté à croire que les personnes qui parlent de suicide le font dans le but de manipuler ou d’attirer l’attention sur eux. Les menaces de suicide doivent toujours être prises au sérieux. Si une personne parle de suicide, il s’agit d’un appel à l’aide qui signifie qu’elle ne va pas bien.
Un départ imprévisible. On peut avoir tendance à croire que le suicide survient sans crier gare et du jour au lendemain. Par contre, plusieurs personnes donnent des indices. Plusieurs signes avant-coureurs (paroles, comportements, attitude) sont méconnus ou difficiles à percevoir, ce qui peut donner l’impression que la personne passe subitement à l’acte (en savoir plus sur les façons de savoir si une personne pense au suicide).
LE PROCESSUS SUICIDAIRE
Un amalgame. Il n’existe pas une cause unique expliquant pourquoi certaines personnes ont des idées suicidaires. Une personne peut vivre des difficultés à différents niveaux dans sa vie ce qui la rend plus fragile. Elle peut rechercher des moyens pour résoudre ses problèmes et se sentir mieux. Lorsque les moyens qu’elles utilisent ne fonctionnent pas de façon satisfaisante, le suicide peut commencer à lui apparaître comme la solution lui permettant de mettre fin à sa souffrance. Plus le répertoire de moyens qu’elle connaît diminue, plus ses idées suicidaires peuvent prendre de l’espace dans sa tête. La personne peut commencer à planifier son geste (comment, où, quand).
Une goutte de trop. Lorsque le vase est trop plein et que la personne envisage le suicide comme la solution à sa souffrance, un événement précis, parfois banal, peut le faire déborder. La personne peut alors basculer et passer à l’acte.
Doucement :
Une personne qui a des idées suicidaires n’a habituellement pas envie de mourir. Elle cherche plutôt à arrêter de souffrir. Si tu penses au suicide :
- c’est parce que ta souffrance est intolérable;
- c’est parce que tu ne sais plus quoi faire pour que cesse ta souffrance;
- c’est parce que mettre fin à tes jours te semble la seule porte de sortie;
- c’est parce que tu souffres et que cela t’empêche de penser à d’autres solutions possibles.
Des passages nuageux. Les situations difficiles ont toujours une fin. Rappelle-toi que les problèmes sont toujours passagers mais que la mort ne l’est pas. Le suicide est un acte irréversible.
La grande noirceur. L’intensité de ta souffrance peut te donner l’impression de te retrouver dans un long tunnel où tu ne vois pas la sortie. Malgré cela, rappelle-toi qu’un tunnel a toujours une sortie et que la lumière est au bout…Il y a toujours un autre moyen pour te sentir mieux que le suicide.
Appel à l’aide. Si tu as des idées suicidaires, il est important que tu en parles. Tu peux penser que parler de ce que tu vis est inutile. Pourtant, parler de tes problèmes peut t’aider à les voir d’une autre façon et à trouver des moyens auxquels tu n’avais pas pensé. C’est un moyen de briser la solitude et d’aller chercher de l’aide, car les gens autour de toi ne peuvent deviner ce que tu ressens si tu n’en parles pas (en savoir plus sur les façons de demander de l’aide si tu es un gars).
Les bonnes portes. Autour de toi, plusieurs personnes peuvent te venir en aide. Il suffit de frapper aux bonnes portes. Quel genre d’aide souhaites-tu recevoir (écoute, recherche de solutions, accompagnement vers une ressource spécialisée, demande d’informations)? Plus ta demande sera précise, plus tu risques de recevoir l’aide que tu cherches. Si tu ne reçois pas l’aide à laquelle tu t’attends, n’hésite pas à frapper à une autre porte. Quelqu’un finira par t’ouvrir! Selon tes besoins, tu peux en parler à :
- une personne en qui tu as confiance et qui pourra te venir en aide (tes parents, un professionnel de l’école ou du CLSC);
- un professionnel d’un organisme comme la maison des jeunes, le Centre de prévention du suicide (1 866 277-3553) ou encore Tel-jeunes.
Sans pareil. Une même situation peut avoir des répercussions différentes selon les gens. Un moyen peut aider une personne à se sentir mieux et n’avoir aucun impact pour une autre. Chaque personne est unique. Le moyen de se sentir mieux varie d’une personne à une autre. Tu es celui qui te connaît le mieux et donc le meilleur juge pour savoir ce qui te fait du bien.
Un pied devant l’autre. Lorsqu’on ne se sent pas bien, on peut avoir tendance à mettre toutes nos difficultés dans le même panier. Plusieurs difficultés mises ensemble peuvent devenir un énorme problème qui paraît insurmontable. Un alpiniste expérimenté pourrait-il gravir le mont Everest en une journée? Peux-tu régler tous tes problèmes en même temps, en claquant des doigts? Évidemment pas! Régler les problèmes un à un, étape par étape, permet d’avancer et de redonner espoir plus rapidement que de chercher à tout régler d’un seul coup. Prends le temps de te poser quelques questions afin de savoir par où commencer :
- Si tu penses à une situation dans laquelle tu te sens mieux, que se passe-t-il?
- Quel petit pas peux-tu faire pour avancer dans cette direction?
- Peux-tu choisir un objectif concret et réaliste pour y arriver?
- Peux-tu te donner un peu de temps?
Un autre angle. Percevoir les situations sous un autre angle, voir la vie différemment, considérer les obstacles comme des défis, reprendre confiance, développer des champs d’intérêt, reprendre des activités qui avaient été délaissées, t’entourer de gens qui croient en toi ou de professionnels qui peuvent te soutenir sont des moyens que tu peux prendre pour aller mieux.
Un petit rayon derrière les nuages. Il y a peut-être déjà un bout de temps que tu songes au suicide. Jusqu’à présent, qu’est-ce qui t’a permis de rester en vie? Une personne que tu apprécies? Une activité qui te passionne? Un animal? Un projet de vie? Un voyage? Mourir, c’est aussi renoncer à tout le beau et à ce qui est important pour toi, dans ta vie. Peux-tu plutôt t’y accrocher?
Deuil et suicide :
SUICIDE D’UN PROCHE : UN ÉVÉNEMENT BOULEVERSANT
En mille morceaux. Perdre une personne par suicide est souvent un choc. Chaque personne réagit à sa manière. Certaines crient, pleurent, se mettent en colère. D’autres se sentent complètement « paralysées » ou ont l’impression de ne rien ressentir comme si leurs émotions étaient engourdies. Si tu as vécu un tel événement et que ta réaction a été différente de celle d’autres personnes de ton entourage, rappelle-toi que chaque personne est unique. Tu vis ton deuil à ta façon.
Des regrets. Le suicide d’une personne peut susciter bien des émotions et des questionnements. Tu peux te dire que « si tu avais fait telle ou telle chose, cela ne serait pas arrivé… » ou que « tu aurais dû comprendre les signes qu’elle donnait ». Personne n’a de contrôle direct sur les actions et les comportements des autres. Le processus suicidaire est très complexe. Les indices qu’une personne donne sur ses intentions sont aussi parfois très subtils. De plus, un seul événement ne peut expliquer à lui seul un suicide. Tu n’es donc pas coupable du suicide d’une personne.
VIVRE UN DEUIL
Une douleur. Le deuil est le processus normal qui accompagne toutes les formes de pertes (décès d'une personne ou fin d'une relation amoureuse) ou de changements importants qui bouleversent le quotidien et nécessitent une adaptation.
Une période indéterminée. La durée du deuil varie d’une personne à une autre. La durée n’est pas toujours proportionnelle à l’amour que l’on ressentait pour la personne qui est partie.
Un parcours sinueux. La période de deuil comprend certaines étapes. Le parcours est différent pour chaque personne. Il se peut que tu aies l’impression de vivre plusieurs étapes simultanément ou encore de vivre les étapes dans un ordre différent de celui d’autres personnes qui vivent aussi le deuil. Tu peux même avoir l’impression de faire un pas en arrière alors que tu croyais aller mieux la veille. Vivre un deuil c’est vivre les montagnes russes.
Chaque chose en son temps. Pour ne pas perdre l’équilibre, pour continuer à fonctionner ou encore parce que d’autres personnes autour de toi ne vont pas bien, il se peut que tu remettes ton deuil à plus tard et que tu continues tes activités quotidiennes comme si rien ne s’était passé. Tu as ton propre rythme. Toutes les personnes ne vivent pas un deuil de la même façon, ni avec la même intensité.
LES ÉTAPES DU DEUIL
Le choc/la négation. « C'est impossible! Ce doit être un accident! » Devant la perte d'un proche par suicide, tu peux avoir tendance à nier ce qui arrive. Tu ne veux pas croire que cela est vrai. Il est normal d'être sous le choc et de se sentir engourdi par la nouvelle. Des images parfois violentes et difficiles à gérer peuvent te venir en tête.
L’incompréhension/le doute. « Pourquoi? » Tu cherches des explications, tu essaies de comprendre le pourquoi. Tu te demandes à qui est la faute et ce qui aurait pu être fait pour éviter cela. Tu aurais voulu une lettre, un mot d’adieu et si tu en as eu, ce n’est pas suffisant. Certaines questions restent sans réponse.
La colère. « Il n'avait pas le droit de me faire vivre ça, de m’abandonner! » À cette étape, tu ressens beaucoup de colère, de frustration, d'injustice. Tu peux percevoir la perte de l'autre comme une trahison et un abandon. Tu peux avoir tendance à déplacer ta colère vers tes amis et ta famille. Être en colère, c'est normal. Par contre, l'agression verbale ou physique d'autres personnes n'est pas un moyen acceptable pour exprimer ta colère. Parle!
La culpabilité. « C'est ma faute, j’aurais dû savoir! » Il peut t'arriver de regretter certaines choses et de croire que tu as des torts (regretter de ne pas lui avoir dit plus souvent que tu l’aimais, de ne pas lui avoir rendu un service demandé, d’avoir eu un conflit avec lui). La culpabilité ne te ramènera pas celui qui est parti. Rappelle-toi qu’il n’y a pas une seule raison qui explique sa mort. Tu n'as de pouvoir que sur toi-même. Pour cette raison, il est important que tu prennes soin de toi.
La tristesse. « Je n'ai plus envie de rien… » Tu es triste, tu pleures beaucoup. Tu as l'impression d'avoir perdu une partie de toi-même. Encore là, c’est normal. Il est important de t'accorder du temps pour pleurer mais tu dois aussi continuer tes activités afin de te changer les idées. Tu ne dois pas perdre de vue toutes les personnes que tu aimes et qui sont encore autour de toi. Certaines personnes choisissent de consulter un professionnel pour les aider à traverser cette étape difficile.
L’espoir. « J'y pense encore, mais je m'en sors » Après tout ce parcours, tu apprends à vivre avec la perte de l'être cher. Tu lui pardonnes et acceptes avec résignation de ne pas avoir toutes les réponses à tes questions. Il se peut qu’il te manque toujours mais tu commences à te sentir mieux et l'avenir ne semble plus aussi noir qu'avant. Tu ne l’as pas oublié pour autant mais tu as de nouveaux rêves, de nouveaux projets et tu es capable d'avoir du plaisir sans te sentir coupable.
REPRENDRE ESPOIR
Donne-toi du temps. La blessure laissée par le suicide d’une personne peut mettre du temps à guérir. Te donnes-tu le droit de respecter ton propre rythme, de ne pas aller mieux tout de suite? Au fil des jours, des mois ou des années, la douleur s’apaisera. Tu n’oublieras pas celui qui est parti, mais ce sera moins souffrant.
Garde les bons souvenirs. En partant, la personne n'a pas apporté tous vos bons souvenirs. Ceux-ci t'appartiennent aussi.
Entoure-toi d’amis et de gens que tu aimes et qui comprennent ce que tu ressens. Ne t’isole surtout pas.
Exprime ta peine. Seul ou avec d’autres personnes touchées par le suicide, tu peux avoir envie de canaliser tes énergies dans un projet qui symbolise ton deuil, tel que la composition d’une chanson, un montage de photos, un dessin, une lettre. C’est un moyen d’exprimer tes émotions et de donner un sens à un événement qui ne semble pas en avoir.
Change-toi les idées. Même si tu n'en ressens pas toujours l’envie, continue de voir des gens et de pratiquer les activités qui te font habituellement du bien.
Parle de ce que tu ressens à quelqu’un en qui tu as confiance, comme à un ami, à un parent, à un adulte que tu aimes bien, à un professionnel ou fais appel à Tel-jeunes!
Évite de te culpabiliser. Cela ne ramènera pas la personne et ne fera qu’amplifier ta tristesse ou ta colère.
Prends soin de toi. Il se peut que d’autres personnes autour de toi soient aussi touchées par ce suicide. Vous pouvez vous soutenir mutuellement mais tu n’as pas à les prendre en charge. Tu as toi aussi ton deuil à vivre.
Évite l’alcool ou la drogue. Dans ces moments difficiles, certaines personnes ont tendance à consommer de l'alcool ou de la drogue dans l’espoir d’anesthésier leur peine. Or, ces substances n'aident jamais à surmonter un deuil. Au contraire, elles peuvent amplifier la douleur et occasionner d’autres difficultés (en savoir plus sur la dépendance à l’alcool et à la drogue).
QUOI FAIRE SI TU AS DES IDÉES SUICIDAIRES
« J’ai trop mal, je vais aller le rejoindre ». Le suicide d’un proche peut entraîner énormément de souffrance. Tu peux en venir à considérer toi aussi le suicide parce que vivre sans l’autre t’apparaît impossible ou encore parce que tu vis toi aussi des difficultés.
« Il a peut-être trouvé la solution ». Le suicide d’un proche peut faire resurgir des souvenirs, des expériences, un sentiment d’impuissance et te confronter à tes propres difficultés. Ta vie est importante et il existe toujours d’autres moyens pour te sentir mieux que d’y renoncer. Rappelle-toi que la personne qui s’est suicidée n’arrivait plus à penser à d’autres moyens de se sentir mieux et n’a pas su obtenir l’aide appropriée. Tu peux faire autrement.
« La vie n’a plus de sens ». Le suicide d’une personne peut venir ébranler ta conception de la vie mais aussi de la mort. La vie peut soudainement te sembler absurde, sans but, ni sens. Elle peut te laisser un goût amer. Personne ne peut répondre parfaitement aux questions existentielles mais cela ne t’empêche pas de partager ta vision et d’échanger avec d’autres personnes sur le sujet. Cela peut t’aider à te resituer et à trouver d’autres repères. Tu peux aussi choisir de donner un sens à ta vie, la percevoir comme un cadeau fragile mais précieux et en profiter au maximum.
« Je n’ai plus aucune raison de rester maintenant ». Aimer une personne et la perdre peut entraîner un immense sentiment de vide. Tu peux avoir l’impression d’avoir perdu toute raison de vivre. Les bons moments, les beaux souvenirs, les valeurs qu’elle t’a léguées et ce qu’elle t’a apporté survivent pourtant bien au-delà de sa mort. En restant bien en vie, tu peux choisir de tenir son flambeau, de faire vivre son souvenir, de parler d’elle, de faire profiter aux autres ce qu’elle t’a appris. Tu lui permets ainsi de laisser sa trace.
« Je vais moi aussi mettre une croix sur ma vie ». Si tu as des idées suicidaires, parles-en (en savoir plus sur les façons de t’aider si tu penses au suicide). Ne t’isole pas. Va chercher du soutien auprès de personnes en qui tu as confiance aussi souvent que tu en ressens le besoin. Les professionnels de ton école, du CLSC, de l’hôpital ou en cabinet privé sont aussi là pour t’aider. Tu peux aussi nous appeler!